Petit rappel :
‘pensées de Saga « bleu »’
‘pensées de Saga « gris »’
Et puis l’italique centré, c’est les paroles des chansons…
ça vous l’aurez deviné…
~ ~ ~
- Tu es sûre que tu ne veux pas que je te ramène, Kath ?
La jeune fille secoua la tête en souriant, et ses boucles blondes dansèrent
sur ses épaules.
- Sûre. Merci. On se voit demain ?
- Ouais. A demain.
Les trois garçons souhaitèrent une bonne nuit à leur amie
et la regardèrent s’éloigner. Celui qui avait proposé
de la ramener, le bassiste du groupe, arborait une mine sombre alors qu’ils
se mettaient tous trois en route dans la direction opposée.
- Allez, Paul, fais pas cette tête là, taquina Johann, le guitariste.
C’est une grande fille. Et puis, elle habite à trois pâtés
de maisons, que veux-tu qu’il lui arrive ?
Cela ne rassura pas le jeune homme blond. Il continua à faire la tête
jusqu’à ce que Tom, le batteur, vienne mettre son grain de sel
:
- D’ailleurs, ça vaut peut-être mieux pour elle de rentrer
seule plutôt que raccompagnée par toi… Combien de fois as-tu
déjà essayé de lui sauter dessus ?
- Oh, ça va ! grogna Paul, se renfrognant encore plus. C’est pas
comme si j’allais la violer ou quoi que ce soit… (Il soupira.) J’ai
presque réussi, la dernière fois…
- Ouais, fit Johann. Avant qu’elle ne te demande gentiment de lui foutre
la paix. Quand admettras-tu que tu n’es pas son genre ?
- Jamais. Je suis son genre.
- Allons, reprit le guitariste en posant un bras sur les épaules de son
ami, l’as-tu déjà vue sortir avec un blond ?
- Non, mais elle n’est jamais sortie avec quelqu’un qui avait les
cheveux rouges non plus, rétorqua Paul, fixant avec insistance les mèches
écarlates de Johann.
- Arrêtez de vous chamailler, les gars, intervint Tom. Je vous signale
qu’on ne l’a jamais vue sortir avec qui que ce soit.
- Et pourtant, c’est pas qu’on ait pas tous essayé, soupira
Johann.
- On est peut-être pas assez bien pour elle, suggéra Tom, passant
une main dans sa tignasse noire.
Les yeux bleus de Paul étincelèrent.
- Tu insinues que c’est une bêcheuse ? s’écria-t-il,
les poings serrés.
- Du calme ! protesta le brun. C’est pas ce que je voulais dire. Mais
il faut voir la vérité en face : qu’est-ce que des gars
comme nous ont à offrir à une fille pareille ? En plus, elle a
l’embarras du choix…
- Je ne suis pas d’accord, intervint Johann. Si tu pars comme ça,
quelle fille voudrait de nous ? Et pourtant, ça fait un moment qu’on
est plus des novices dans ce domaine-là…
- De toute façon, fit Paul en haussant les épaules, elle finira
bien par se rendre compte de ce qu’elle perd en me repoussant, et elle
me tombera dans les bras.
Johann éclata de rire et les yeux noisette de Tom se plissèrent
sous l’effort qu’il fournissait pour rester sérieux.
- C’est ça, Don Juan, s’exclama le guitariste.
Ils continuèrent leur chemin, moitié riant, moitié se chamaillant,
puis se séparèrent pour rentrer chez eux.
* * *
Contrairement à ce que pensaient ses compagnons, Kathlynn ne prit pas
directement le chemin de chez elle. Elle se sentait d’humeur vagabonde,
aussi bifurqua-t-elle afin de prendre une route plus longue.
Ce faisant, elle pensait à la soirée, au concert. Elle aimait
bien ce bar, le public y était toujours chaleureux. La plupart des clients
étaient des habitués, et elle les connaissait tous plus ou moins.
Mais ce soir, il y avait aussi eu des gens qu’elle ne connaissait pas.
Méanor et sa sœur avaient amené quelques uns de leurs amis
; dont un jeune homme aux cheveux bleus qui l’avait étrangement
troublée. Il se tenait dans son coin, riait de temps en temps à
une blague d’un de ses amis, buvait peu. Mais lorsque leurs regards s’étaient
croisés, elle avait été comme hypnotisée.
Passing by you light up my darkest skies
You'll take only seconds to draw me in
Dans ses yeux, elle avait vu de la tristesse, de l’envie, de la résignation. Et aussi quelque chose d’étrange, comme une ombre mouvante qui voilait de temps à autre le bleu intense de ces prunelles.
So be mine and your innocence I will consume
C’était un appel, totalement irrésistible, et une partie d’elle-même avait été obligée de l’arracher à sa contemplation. Sans quoi elle serait descendue de la scène pur aller fondre dans les bras puissants de ce si beau jeune homme.
Dark shines
Bringing me down
Making my heart feel sore
Because it's good
Kathlynn poussa un soupir. De toute façon, il était fort improbable
qu’elle revoie ce garçon, alors c’était inutile de
s’appesantir sur le sujet. Elle secoua la tête et décida
de rentrer chez elle, car la nuit était déjà bien avancée.
Sans s’en rendre compte, elle avait fait un détour plus grand que
prévu. Elle maudit à voix basse son côté tête
en l’air et tourna à gauche pour rejoindre une route plus importante.
Alors que, chantonnant doucement, elle longeait un passage obscur donnant sur
quelque cour encombrée et puante, une main s’abattit sur son bras.
Elle poussa un cri de surprise, recula de deux pas et se cogna contre quelqu’un.
Elle se retourna et reconnut un habitué du pub, un de ceux à qui
elle avait opposé un ferme refus lorsqu’ils lui avaient exprimé
leur intérêt en termes plus ou moins crus.
- Hé, gamine, tu te ballades sans tes gorilles, ce soir ?
L’homme empestait l’alcool à trois mètres, et son
haleine était tellement chargée que Kathlynn en eut la nausée.
D’autres individus sortirent de recoins sombres et entourèrent
la jeune fille. Celle-ci sentit une sueur froide couler le long de son dos.
- Laissez-moi tranquille, dit-elle, d’une voix qu’elle aurait voulue
plus ferme.
- Et tu vas faire quoi sinon ? fit l’homme en s’avançant,
menaçant. Nous percer les tympans avec ta jolie petite voix ? Appelle
au secours, chérie. Fais-moi plaisir.
Kathlynn examina frénétiquement les possibilités qui s’offraient
à elle, et tomba sur un chiffre terrifiant : zéro. Elle avait
absolument aucune échappatoire, avec cette troupe d’ivrognes qui
était en train de se resserrer sur elle comme un essaim de charognards.
Et en plus, le cri qu’elle avait dans la gorge refusait de sortir.
- Allez, petite. Tu devines pas ce qui t’attend ? C’est pas drôle
si tu cries pas…
Des ricanements malsains s’élevèrent autour d’elle.
Des doigts lui saisirent les bras, les cheveux. L’homme passa une main
grasse sur sa joue, puis descendit sur sa poitrine ; il prenant son temps, mais
une lueur avide brillait dans son regard torve. Les yeux de Kathlynn s’emplirent
de larmes et elle les ferma, désespérée.
Et elle pria, pria pour que quelqu’un, n’importe qui, la sauve.
* * *
Saga errait au hasard des ruelles depuis deux bonnes heures, et il n’avait
toujours pas envie de rentrer au Sanctuaire. L’Autre s’agitait en
lui, et il savait qu’il ne pourrait pas dormir s’il ne trouvait
pas le moyen de le calmer. Et le moyen le plus simple état encore…
‘Une bagarre.’
‘Oui, je sais,’ répondit Saga, passablement agacé.
‘Mais si tu crois que je vais te laisser…’
‘Non. Une bagarre. Là bas. Ou quelque chose d’approchant.
On y va ?’
Une sombre excitation envahit Saga, venant de son autre personnalité.
Il lutta contre ce sentiment, comme il l’avait fait durant toute la soirée.
Durant toute sa vie.
Il se sentit soudain terriblement las. Au prix d’un effort notable, il
fit demi-tour et partit dans la direction opposée à celle que
lui avait indiquée l’Autre. Il n’avait fait que trois pas
lorsqu’un cri parvint à ses oreilles.
« NON !! »
‘Cette…’
‘… voix !’
En tendant l’oreille, il entendit des rires gras, mais cette voix…
Sans réfléchir, il se mit à courir vers la ruelle.
‘Laisse-moi la place !’ hurla l’Autre
dans son esprit.
Il résista, décidé à garder le contrôle de
la situation. Mais lorsqu’il parvint sur les lieux, le spectacle qui s’offrit
à sa vue le mit dans une rage noire.
La chanteuse - sa chanteuse - était aux prises avec
une bande de brutes qui étaient en train de la…
‘D’accord. Vas-y.’
Son cosmos s’éveilla, nimbant son corps d’une froide lueur
dorée et le préparant au combat, mais aucun des hommes ne le remarqua.
Ils étaient trop occupés à brailler, à rire et à
braquer leurs lampes torches au centre de leur troupe. Un sourd grondement naquit
dans la gorge du Chevalier en même temps que ses cheveux changeaient de
couleur, que ses yeux s’assombrissaient, s’injectaient de sang.
Son aura s’estompa, restant à peine visible, et il s’avança
rapidement vers le groupe. Des sanglots lui parvenaient, étouffés
par la multitude de corps qui l’entouraient, et cela attisa sa colère.
Un des agresseurs s’aperçut enfin de sa présence et s’écria
:
- Hé ! C’est qui celui-là ?
Ses compagnons cessèrent leurs « activités » et se
tournèrent vers lui. Celui qui semblait être le chef s’écarta
d’un corps étendu à terre et grogna :
- Barre-toi, Ducon. Tu vois pas que tu déranges ?
Saga eut un sourire carnassier et décida que cette bande d’imbéciles
ne méritaient pas qu’il les épargne. Il se fit donc un devoir
de les envoyer, les uns après les autres, s’écraser contre
les murs - cela lui prit une bonne demi-seconde. Lorsque celui qui avait osé
l’insulter se trouva soulevé de terre, les pieds à vingt
centimètres du sol, il se fit tout de suite plus conciliant.
- Hé, t’énerve pas, mon gars. Si c’es la fille que
tu veux…
- Ce que je veux, murmura Saga en le fixant de ses yeux injectés de sang,
c’est me débarrasser des déchets de ton espèce.
Un craquement sinistre résonna dans la ruelle silencieuse, et le corps
inerte de l’homme retomba non loin du Chevalier.
La jeune fille était recroquevillée contre le mur - à l’endroit
même où son tourmenteur l’avait abandonnée, secouée
de sanglots. Craignant sans doute que ses agresseurs reprennent leur tâche,
ou pire encore.
Hold your hands up to your eyes again
Hide from the scary scenes, suppress your fears
‘Elle n’a peut-être pas tort,’ soupira Saga du fond de sa conscience.
So be mine and your innocence I will consume
Le Chevalier s’avança, sentant l’Autre se retirer en ne laissant qu’une sombre délectation dans son esprit. Ses cheveux reprirent une couleur bleue, tandis que ses yeux redevenaient ceux d’un homme ordinaire.
La rue était sombre, seulement éclairée par quelques torches
tombées à terre et par la clarté lointaine des étoiles.
Kathlynn n’avait pas eu le temps de voir ce qu’il s’était
passé, mais ses agresseurs gisaient à présent à
terre, et celui qui était responsable de cela se tourna vers elle dans
l’obscurité.
Dark shines
Bringing me down
Making my heart feel sore
Because it's good
Elle ressentit une bouffée de reconnaissance envers cette personne,
quelle qu’elle soit. Mais en même temps, elle avait peur de cet
inconnu au physique imposant qui était en train de s’avancer vers
elle. Il avait fait preuve d’une brutalité peu commune, à
en juger par l’état des pauvres bougres qui avaient osé
se mesurer à lui.
Mais elle pouvait difficilement lui en vouloir…
Il mit un genou en terre et tendit doucement la main. Un rayon de lune tomba
sur son visage et elle reconnut, non sans surprise, les traits du jeune homme
du bar.
- Ca va ? murmura-t-il.
- O… oui…
Encore sous le choc, elle glissa ses doigts tremblants dans la main offerte,
et il l’aida à se relever. Plongeant son regard dans celui de son
sauveur, elle y décela une ombre, plus présente encore que dans
son souvenir. Mais était-ce à cause de l’obscurité
ambiante, ou pour une autre raison ?
Elle détourna les yeux, mal à l’aise. Ce garçon venait
de la sauver, et c’était ainsi qu’elle le…
- Viens. Partons d’ici.
Il avait parlé calmement, mais elle sursauta, nerveuse. Elle hocha la
tête et ils se mirent en route.
Ce ne fut que lorsqu’ils s’arrêtèrent devant chez elle
qu’elle se rendit compte qu’il n’avait pas lâché
sa main de tout le trajet. Une chaleur se propagea le long de son bras, remonta
jusqu’à ses joues.
- C’est… là que j’habite, dit-elle en rougissant.
- Ah… bonne nuit… répondit-il, l’ombre dans son regard
plus visible que jamais.
Il lâcha ses doigts un à un, comme à regrets.
- Je… Merci, dit-elle simplement, renonçant à démêler
le fil de ses émotions.
Il sourit et plongea son regard dans les prunelles de la jeune fille - lesquelles
étaient marron, et non dorées comme il l’avait cru un peu
plus tôt dans la soirée.
- Comment tu t’appelles ?
Elle réalisa qu’en effet, elle ne lui avait pas dit son nom.
- Kathlynn. Et toi ?
- Saga…
Il tourna la tête, semblant un instant en proie à un conflit intérieur,
puis demanda :
- On pourrait… se revoir ?
A nouveau, cette chaleur insidieuse coula en elle… elle répondit
:
- Bien sûr. Je chante tous les jeudis avec le groupe, au pub.
- D’accord. A jeudi alors…
Il tourna les talons et s’éloigna sans la regarder. Elle resta
un moment immobile, les yeux dans le vague. Puis elle ouvrit la porte mécaniquement
et rentra chez elle comme un automate, tentant d’identifier les sentiments
que cette soirée avait fait naître en elle. Si ce qu’elle
éprouvait était de la joie, alors d’où venait cette
sourde angoisse qui lui étreignait le cœur ?
Elle secoua la tête, tout en se préparant à dormir. Sans
doute était-ce le contre-coup de son agression. Elle se coucha et ferma
les yeux, mais dans son esprit dansait l’image d’un jeune homme
aux longs cheveux bleus.
Morphée lui ouvrit les bras et elle s’y abandonna, épuisée.
Bleus…
… et gris…
Dark shines
Bringing me down
Making my heart feel sore
Because it's good
~ ~ ~
NdA : Valààà !!! Nouveau chapitre, posté
en un temps RECORD !!! (enfin, pour moi…)
Disclaimer : J’ai beau faire tous mes tiroirs, pas l’ombre d’un Chevalier d’Athéna… Ouin… Par contre, Kathlynn est à MOI, alors PAS TOUCHE !! Et puis Paul, Johann et Tom aussi. Na.
Bon ben on s’en doutait, que la vraie rencontre entre Kath et Saga allait se produire… sinon ça servait à quoi que je la décrive avec autant de précision dans le premier chapitre ??? lolol
Elle est un peu bizarre, quand même… la plupart des filles seraient attirées par le côté « brillant » de Saga (Chevalier d’Or et tout le toutim), mais elle, c’est son côté « obscur » qui l’émoustille, comme le fait comprendre la chanson… Encore une qui aime les bad boys… Eh ben elle va être servie, croyez-moi.
La petite conversation à la fin peut faire un peu « gamin », mais il ne faut pas perdre de vue que Saga a QUINZE ANS à cette époque-là, et Kathlynn a à peu près le même âge. D’ailleurs, le prénom de la demoiselle veut dire « innocente », bien choisi, non ?
A propos de Muse : Pour ceux qui se demandent pourquoi la chanson Muscle Museum porte ce nom bizarre, ne cherchez plus : c’est tout simplement parce que dans le dico anglais, le mot Muse est situé entre ces deux mots-là. Quant à savoir pourquoi Matthew Bellamy a décidé de donner ce titre à cette chanson en particulier, franchement, j’en sais rien. On peut pas tout savoir, non plus. (Source : Muse de A à Z, de Christel Moreau)
A suivre : Saga est de plus en plus attiré par Kath, mais il ne veux toujours pas lui faire de mal… Quelle personnalité l’emportera ? Titre du chapitre : Sunburn.
Allez, je m’y remets. Une pitite review pour la route ???
Alake.