Chapitre IV : Le secret des Elfes Noirs

 

Celle qui tisse

 

Les nuages noirs, ayant cessé leur course dans le ciel étoilé, demeuraient immobiles, interceptant les faibles rayons de la lumière lunaire. La neige commençait à tomber, les flocons se frayant un passage entre les branches difformes des arbres de l'antique forêt. Là, Yshba, Thrall et Meijuk restaient tapis dans l'ombre à l'abri d'une souche séculaire. Les compagnons n'avaient pas tardé en chemin, courant la plupart du temps, ne s'accordant que peu de repos. Chacun rivalisait de résistance et il était difficile de savoir qui avait le plus souffert de ce périple. Après deux jours de marche à travers les Montagnes Blanches, le petit groupe avait bifurqué plein est afin de rejoindre la Forêt Ancestrale, ainsi dénommée par les habitants du royaume pour rendre hommage aux arbres millénaires qui la composaient. C'est au moment d'y pénétrer qu'ils firent leur macabre découverte : sept Odjurwigs, pulvérisés, démantibulés, dont les restes avaient été soigneusement accrochés à trois arbres qui portaient eux aussi les traces d'un terrible combat. Selon les légendes, les êtres mi-hommes, mi-araignées avaient été créés par la Déesse-Araignée. On disait qu'ils avaient une grande force et de nombreux pouvoirs magiques. D’après certains textes, les Odjurwigs étaient tous des Elfes Noirs ayant échoué à une épreuve destinée à en faire des serviteurs d'élite de la Déesse-Araignée. Les informations étaient cependant confuses à ce sujet : de nombreuses sources mentionnaient la haine totale entre Odjurwigs et Elfes Noirs, ce qui rendait cette transformation peu probable ; de toute façon, tous ceux qui avaient été rencontrés en Asgard étaient d'anciens humains. Le mystère planait encore sur la cohabitation réelle des deux espèces : le pacte entre la Déesse-Araignée et le Roi de Nibelung devait être particulier. A quelques reprises, les guerriers d'Odin avaient dû se battre contre de jeunes Odjurwigs. Ces derniers devenaient plus puissants avec l'âge, il fallait le temps que le corps humain « accepte » sa transformation en demi-araignée. Les humains ainsi transformés ne survivaient pas tous très longtemps, les prêtres de la Déesse-Araignée qui accomplissaient le rituel de transformation envoyaient les jeunes créatures s'aguerrir contre les hommes d'Asgard. Celles qui revenaient vivantes étaient envoyées dans de sombres cavernes où elles achevaient de maîtriser leurs nouveaux pouvoirs, devenant des guerriers aux puissants sortilèges. Les Odjurwigs que Thrall et ses amis avaient combattus étaient tous jeunes, les combats avaient été à ce point difficiles qu'ils les avaient combattus à chaque fois à trois contre un. Thrall était resté longtemps concentré sur les restes d'une des créatures. « Ces Odjurwigs étaient plus puissants que ceux que nous avons combattu. Ils portent une armure, des armes sombres au métal inconnu. Je ne sais pas qui étaient ceux qui les ont tués mais je ne reconnais pas là une pratique de fiers Asgardiens ... », conclut Thrall en rejoignant Meijuk et Yshba qui lui faisaient comprendre qu'il était temps de repartir.

Depuis deux jours, les trois hommes n'avaient pas changé de cachette. La souche était imposante et offrait un bon abri face au vent qui soufflait de temps à autre en une sinistre complainte à travers les arbres tortueux. A tour de rôle, ils montaient la garde et espionnaient les va-et-vient d'Elfes Noirs, parfois accompagnés d'un  Odjurwig en armure, tels ceux qu'ils avaient découverts à l'orée de la sinistre forêt. Jusqu'alors la lune avait été trop claire et les patrouilles trop nombreuses pour pouvoir se déplacer sans être repérer. Les Elfes Noirs étaient de redoutables combattants et savaient parfaitement repérer les mouvements inhabituels en forêt. Suivant les conseils prodigués par Gunther lors de leurs séjours à Troudheim, le trio avait décidé d'attendre une journée de grande brume ou, mieux encore, de tempête, pour avancer plus avant à la recherche du repaire de la Déesse-Araignée.

Le souffle coupé, l'ombre trébucha une nouvelle fois. L'inconnu se retourna rapidement pour voir s'il était suivi. Rien. Il fallait reprendre la course, quitter au plus vite cet endroit maudit. Relevant la tête, l'inconnu se remit à courir le plus vite que ses jambes endolories par la fatigue et le froid pouvaient le lui permettre. Il ne vit pas le coup venir et s'effondra la tête la première dans une souche pourrie qui lui déchira une partie du visage.

- Qui est-ce ? Ce n'est pas un Elfe Noir, on dirait un paysan, ou un bûcheron. Mais qu'est-ce qu'il fout là ?
- Je n'en sais rien, Thrall, mais on ne peut pas le laisser ici. Emmenons-le dans notre cache, nous le questionnerons à l'abri des regards indiscrets.
Meijuk avait entendu la course de l'inconnu pendant qu'il faisait son tour de garde. Il avait décidé de se porter en avant du danger potentiel, réveillant Thrall qui dormait à peine. Yshba quant à lui était parti avec son loup en reconnaissance en profitant de la pénombre et de la neige qui tombait drue. L'eau glaciale qu'il reçut sur le visage le retira de sa léthargie en un instant. Deux hommes en armes se tenaient au-dessus de lui. La fuite n'était pas envisageable. Ce n'étaient pas des Elfes Noirs, leurs armures de cuir et de fourrure de loup des neiges, ce pendentif ... des guerriers d'Odin !

- Louée soit Idunn (1), elle a entendu ma prière ! Merci messeigneurs, merci de m'avoir sauvé, d'être venu à notre rescousse ! Mes compagnons et moi désespérions ! cria-t-il en relevant son buste péniblement.
- Ferme-la et reste assis ! Tu vas nous attirer des ennuis avec tes cris de femmes. Ne te réjouis pas trop vite, nous ne sommes pas là pour toi. Qui es-tu ? questionna Thrall d'une voix menaçante.
- Mais nous vous attendions depuis si longtemps, nous...
- Réponds, coupa Thrall en faisant mine de dégainer son glaive ce qui fit intervenir Meijuk d'un geste ferme de la main.
- Doucement, laisse-le parler. Tu vois bien qu'il est terrorisé. Alors, reprit-il en se tournant vers l'inconnu, « raconte nous tout ».

Lundrifr, qui se rendait compte à son plus grand désespoir que ces deux hommes n'étaient pas là pour le sauver, narra son histoire la voix emplie de tristesse. Il était bûcheron dans un petit village au nord de la Forêt Ancestrale. Plusieurs semaines auparavant, des Elfes Noirs menés par un puissant Odjurwig avaient rasé leur hameau et enlevé tous les habitants. Les femmes, les enfants et les vieillards avaient été donnés en pâture à des vendeurs d'esclaves germains. Meijuk et Thrall savaient que cette pratique était courante : les farouches guerriers de Germanie louaient leurs services contre de l'argent ou des esclaves qui les remplaçaient comme force de travail dans leurs villages ;  ils pouvaient ainsi partir en campagne et dévaster les contrées voisines. Les hommes avaient tous été enrôlés comme esclaves au profit des forces du Roi des Elfes Noirs : ils travaillaient pour la plupart dans des fourneaux qui fabriquaient des armes et des armures pour les troupes du sinistre souverain elfique. L'un d'entre eux avait réussi à s'échapper quelques jours auparavant. Depuis les gardes étaient très nerveux. On disait qu'un mystérieux guerrier à l'armure sombre ravageait les rangs des meilleurs Odjurwigs. Il était clair que l'évasion avait réussi et que les guerriers d'Odin préparaient une opération de sauvetage d'envergure. Ne voyant toujours rien venir, Lundrifr avait décidé de s'échapper à son tour en profitant d'une pleine lune qui rendait les gardes moins attentifs (il semblait que les Elfes Noirs rendait un culte à cet astre et buvaient en l'occasion des breuvages qui les enivraient). Il avait fini sa course contre une souche, frappé par-derrière sans qu'il puisse réagir. 

- Ce campement, où se trouve-t-il ? Il ne doit pas être trop éloigné, tu n'es pas homme à parcourir des distances fantastiques en si peu de temps, dans une forêt si sombre et dangereuse ..., questionna Meijuk en plissa son front tandis que Lundrifr regardait avec une curiosité teintée d'inquiétude les tatouages du serviteur d'Odin.
- J'ai couru pendant un certain temps, deux, peut-être trois heures. Le campement se trouve à côté de la crypte des Odjurwigs. C'est de là qu'ils sortent tous. C'est un endroit qui fait peur, croyez-moi. On entend des cris épouvantables tous les soirs, on doit y torturer des gens.
Lundrifr regarda tour à tour Meijuk et Thrall. Leurs yeux brillaient de joie, une joie sinistre. Les deux guerriers semblaient heureux de pouvoir se rapprocher des portes de l'enfer. Non, ils n'étaient pas là pour lui, ni pour ses pauvres congénères.
- Tu pourrais nous y conduire ?
- Retourner là-bas ? Vous êtes fous ! Vous ne pourrez rien à deux !
- A deux non, à trois si, lâcha Yshba qui avait silencieusement suivi la fin de l'histoire de Lundrifr tapi dans l'ombre auprès de Lupus.
- Lundrifr, si tu nous conduis là bas je te jure que nous sauverons les tiens. Mais nous devons savoir réellement de quoi il retourne avant d'envoyer plus d'hommes. Nous sommes des éclaireurs, assura Meijuk d'un ton bienveillant.

Ils suivirent le chemin emprunté par le malheureux bûcheron sans rencontrer la moindre patrouille hostile. Les éléments jouaient pour eux, par une étrange ironie, les forces du Roi des Elfes Noirs ne semblaient pas supporter le froid trop intense. Par le passé, Rahotep avait déjà remarqué ce fait et avait émis l'hypothèse que les Elfes Noirs voyaient leurs sens troublés par la neige, ce qui expliquait en partie leur attrait pour les forêts les plus denses, à même de les protéger des trop grosses tempêtes glaciales si fréquentes en Asgard. Akurgal, très intéressé par cette civilisation, comme par toute nouveauté intellectuelle, avait également découvert dans les recueils de la Forteresse que ces êtres vivaient normalement sous terre, et n'étaient venus en Asgard qu'assez récemment : leurs terres natales se trouvaient être au cœur de la lointaine Germanie. Pour l'heure, ces débats n'intéressaient pas vraiment le trio, seuls les faits comptaient : ils pouvaient espérer accomplir leur mission sans être découverts.

C'est par un chemin étroit, bordé des deux côtés par des pierres mégalithiques, qu’ils virent enfin deux piliers de pierre brune surmontés de sculptures représentant des araignées autour d'une lune, patinés par le temps. Il n'y avait personne, aucun Elfe Noir, aucun Odjurwig. La vision du temple était-elle censée effrayer les aventuriers à ce point qu'il ne fallût pas mettre de gardes ? Le temple, circulaire, était totalement recouvert d’épaisses toiles d'araignée. Il était certain que des arachnides communs n'avait pas été capables de produire un tel résultat : magie ou araignée géante semblaient être les seules explications possibles, sans qu'aucune ne soit réellement réconfortante. Les murs de pierres noires étaient hérissés de pics de métal, sur lesquelles des formes étranges et arrondies venaient atténuer l'aspect menaçant. En se rapprochant un peu, Yshba fut parcouru d'un frisson d'horreur ; les pics étaient effectivement moins pointus que d'ordinaires, des têtes fraîchement empalées et des crânes plus anciens venant orner l'ensemble des murs de l'édifice. Lundrifr reconnut tout de suite la tête de celui qui s'était échappé avant lui : Meijuk pressa sa main contre sa bouche pour étouffer son cri d'horreur naissant. Thrall de son côté posa longuement son regard sur une statue défigurée : une femme, reconnaissable à sa poitrine généreuse, la tête arrachée, les bras brisés, jonchant le sol sous un lit de détritus divers. « C'est un temple transformé en place forte », souffla-t-il à ses compagnons. « Les pics ont été rajoutés, cette statue a été visiblement saccagée par les nouveaux occupants ».

Tandis qu'ils poursuivaient leurs observations en faisant bien attention de ne pas se faire repérer par une éventuelle patrouille adverse, deux yeux suivaient la scène avec attention. Caché derrière un arbre, à bonne distance, une ombre les avait suivis. L'inconnu portait un lourd manteau en peau d'ours qui trahissait mal les formes menaçantes de l'armure qu'il portait en dessous. A quelques centimètres du sol, une boule aux pics acérés et parcourus de lambeaux de chairs se balançait tranquillement au bout d'une chaîne, suivant le rythme irrégulier des bourrasques qui soulevaient au passage des petits tourbillons de neige. Son pied gauche, posé sur la tête d'un Odjurwig mort, déchiqueté, dont seule la partie supérieure du tronc était encore intacte, effectua une brève pression vers le sol. Le crâne craqua sous l'impact, la tête explosa dans un sinistre son étouffé par le mugissement du vent dans les arbres. « Vous l'avez donc trouvé. Mission accomplie. ». Sourire au coin, l'ombre disparut.

 

***

L'adversaire rompit la prise en dégainant sa propre lame. Mais ses mouvements étaient lents et gauches. Il para, tenta de pointer, manqua devant l'esquive de Memnoch et le métal froid, irradié de glace et d'électricité lui transperça la gorge. L'Elfe Noir mourut étouffé par son sang.
- Tu es de plus en plus redoutable Memnoch, dit Hanz en ôtant son casque pour passer son gantelet sur ses cheveux bruns. Ses yeux clairs trahissaient une certaine admiration pour le chasseur à la petite barbichette noire. Memnoch aimait beaucoup les combats et progressait à chaque fois davantage. Son enfance, passée à la chasse sur les bords du grand fleuve germain (2) qui symbolisait la frontière avec sa terre natale, l'avait conduit vers les plus hauts degrés de maîtrise de toute sorte d'armes. Lors du périple vers Hattousa, il avait déjà sauvé ses amis avec l'aide de Nekkar, affrontant seul plusieurs Sinanthropes. Snyderthur, son maître à Hattousa l'avait initié aux derniers secrets de la chasse et ses sept premières années au service d'Odin avaient achevé d'en faire un guerrier accompli, respecté par ses amis, craint par ses adversaires.
- Merci mon ami. Ces Elfes Noirs ne sont pas si redoutables en définitive, s'ils ne peuvent attaquer par surprise, ils n'ont aucune chance face à nous : nos armes ensorcelées par la grâce d'Odin, notre force, je ne vois qu'Akurgal ou Nibel pour éprouver des difficultés face à eux.
- Tu as raison, convint Hanz, mais ta dextérité est bien au-dessus de la moyenne. Je compte plus sur ma force pour emporter la décision, je devrais davantage suivre ton exemple et m'exercer à éviter les coups et viser juste : mes forces seraient ...
Subitement, Hanz se tourna, sondant du regard l'obscure forêt. Les autres serviteurs d'Odin rejoignirent bientôt les deux hommes et purent à leur tour entendre les bruits étouffés d'un combat qui s'achevait à quelques distances de là.
- Ce sont les nôtres ?
- Ne dis pas de bêtises Liu, rétorqua Dimitre le regard inquisiteur. Nous sommes dans la Forêt des Elfes Noirs, personne, mis à part nous, n'est autorisé à y pénétrer, Gunther a été très strict sur ce point, nos troupes sont trop peu nombreuses pour quitter la garde de Troudheim !
- Calme-toi Dimitre, il ne sert à rien de s'énerver. Hanz remit son casque, surmonté du dragon d'Asgard, et scruta longuement les arbres qui se dressaient devant le groupe à la recherche d'un éventuel mouvement.
- Ce sont peut-être des villageois ou des voyageurs qui ont été attaqués ? se risqua Nibel en serrant son écu contre son côté gauche.
- Il n'y a pas à tergiverser. Fonçons voir ce qui se passe. Après tout, c'est peut-être le capitaine qui essaie de s'échapper. Inutile de discuter davantage, nous avons une mission à remplir il me semble.
- Tu as raison Dimitre, allons-y, rétorqua Memnoch qui arborait un sourire carnassier en songeant aux possibles combats à venir.

Emmitouflé dans des fourrures, un imposant guerrier attendait, assis sur un tas de cadavres d'Elfes Noirs. Il portait, par-dessus une armure de cuir clouté semblable à celles des guerriers d'Odin, une pelisse soyeuse et blanche, de la marte d'hiver, dont la large capuche recouvrait son casque à tête draconienne. Il portait en sus des bottes et des gants en peau de bœuf à longs poils, fourrés et brodés, des sacoches et des fourreaux en cuir souple pour son arc, ses deux lances et sa hache de guerre rougie du sang de ses adversaires. Voyant les guerriers d'Odin se rapprocher il se mit debout, révélant son imposante stature, plus haute que celle de Meijuk, découvrant un visage dur, mis en valeur par une barbe rousse taillée avec soin.
« Vous voilà enfin », lâcha-t-il à la volée. « Bjarnulf, guerrier d'Odin. Gunther m'a envoyé ici à votre rencontre dès que j'ai eu achevé ma mission dans le nord ».

Tout d'abord surpris et méfiants, les guerriers d'Odin reconnurent sans peine l'équipement qui était aussi le leur. Seules les bottes et les gants divergeaient.
- Qui nous dit que tu dis vrai ? Tu aurais pu détrousser l'un des nôtres et nous attendre ici, s'inquiéta Hanz, tandis que ses compagnons se positionnaient autour de Bjarnulf, l'arme en main.
- Bien entendu. Et à qui aurais-je pu prendre cet équipement ? Pourquoi aurais-je tué ces Elfes Noirs, pourquoi ne pas vous avoir décimés de mes flèches ?
- Tout ceci est effectivement surprenant, mais nous connaissons tous les guerriers d'Odin et tu n'en fais pas partie ..., rétorqua froidement Memnoch.
- Vous connaissez ceux qui sont arrivés avec vous. Vous ne connaissiez pas le malheureux Siegard. Vous avez disparu cinq longues années, Thenséric et Gunther ont levé de nouveaux volontaires, dont moi. Certains sont déjà morts au combat, d'autres servent dans les endroits les plus reculés de notre terre sacrée. Comme j'étais particulièrement doué, Gunther a jugé que je pouvais vous rejoindre, rejoindre les guerriers d'élite que vous formez. C'est avec joie que j'ai accepté.
- Les endroits les plus reculés d'Asgard ? Mais qui combattez-vous ? Et pourquoi ni Gunther, ni Thenséric ne nous ont avertis ?
Les traits durs de Bjarnulf esquissèrent une grimace espiègle tandis qu'il répondit à Nibel, le fixant droit des les yeux.
- Tu sais, Asgard est une bien grande terre, ses ennemis sont nombreux. Loki, le Roi des Elfes Noirs, sans parler de tous les monstres qui sont apparus depuis ce que vous avez vécu en Astragoth, le travail ne manque pas. Gunther m'a expliqué que vous formiez une troupe d'élite à laquelle on ne confiait que des missions spéciales. Nous autres devions nous battre contre les menaces quotidiennes. Ces huit derniers mois j'ai ainsi été en poste dans les montagnes du nord, où des Trolls tentent d'établir un royaume. Une grande partie de nos métaux sont dans ces montagnes, nous devions donc avec mes compagnons les combattre sous la conduite de notre chef Jorik, un puissant Seigneur de guerre comme Thenséric que vous connaissez.
- Ton histoire se tient, admit Hanz. « Et ces cadavres, est-ce là ton œuvre ? »
- Oui, répondit fièrement Bjarnulf. « Je les ai massacrés. Ces Elfes Noirs sont bien moins redoutables que les Trolls, ils ont une force de femme. Ils patrouillaient à proximité d'une tour sombre qui se trouve à quelques dizaines de mètres, par là », indiqua-t-il en montrant une vague direction à travers la brume givrée qui flottait au-dessus du sol.

Le groupe de guerrier se dirigea vers la tour sous la conduite de Bjarnulf. Ryusei avait tout de suite fait le rapprochement entre cet édifice et une possible prison pour le chef de la garde qu'ils cherchaient. Les faits lui donnèrent raison lorsque Dimitre défonça la porte d'entrée du bâtiment de pierre sombre. La tour était en fait un donjon édifié par les Elfes Noirs au beau milieu de leur forêt. Il servait à la fois de retranchement à une petite garnison et de prison. Le système défensif des Elfes Noirs reposait sur une multitude de petites fortifications semblables qui permettaient de totalement contrôler le territoire de leur vaste forêt. Il reposait aussi sur la peur. A perte du vue s'étendait cet inquiétant manteau vert, nappé d'une brume constante, emplie de bruits étranges, inquiétants, où les murmures d'Astragoth se perdaient parmi les mugissements des arbres aux formes disgracieuses.
« Odin veille sur nous, il nous a guidés dans cette terre maudite : regardez donc ce spectacle ! »
Dimitre venait de pénétrer dans la première pièce dans un fracas tonitruant. Hache à la main, il s'était attendu à tomber sur des adversaires mais à sa grande surprise il ne rencontra aucune résistance. La bâtisse semblait vide. Libérant son passage en poussant sans ménagement les quelques chaises qui se dressaient devant lui, il se dirigea tel un loup sur sa proie vers la seule porte intérieure apparente, solidement cadenacée, tandis que les autres inspectaient plus tranquillement les affaires laissées là par une dizaine d'individus. Un seul coup de hache suffit à pulvériser la porte. Dans la pièce sombre, rectangulaire, poisseuse et puante, un soldat se tenait assis contre la pierre froide, les mains enchaînées en hauteur, le visage hagard. A côté de lui, quatre corps finissaient de se décomposer dans une exhalaison suffocante. Dimitre porta une main à son visage pour ne pas respirer davantage la puanteur de la mort.

Les guerriers d'Odin libérèrent le soldat qui s'avéra bien être Lueciek, le capitaine de la garde qu'ils recherchaient. Bjarnulf avait décidément fait grand carnage car il apparut qu'il avait décimé à lui seul l'ensemble de la garnison de la tour. Lueciek avait été envoyé en mission spéciale afin d'en savoir plus sur les agissements du Roi des Elfes Noirs. Il avait été fait prisonnier après un terrible combat dans cette forêt et mené avec ses hommes survivants dans cette tour pour y être torturés sans qu'on leur posât la moindre question. Il avait pu découvrir certains éléments importants, qu'il avait complété en suivant les conversations de ses geôliers, peu méfiants à son égard, car il comprenait le langage elfique : la Déesse-Araignée avait été réveillée par leur Roi mais s'était emparée de son esprit. Tous deux préparaient maintenant une armée, dans une crypte. Pour rejoindre ce repaire, il fallait une clé spéciale de métal noir que seuls les Odjurwigs, qui commandaient maintenant aux Elfes Noirs, avaient en leur possession.

« Voilà des informations décisives, Lueciek. Nous allons te ramener avec nous à Troudheim, tu n'as plus rien à craindre. Je pense déjà savoir ce qu'est ce métal noir, du Mithrill des Nains Fils de Fjalar. Gunther et Thenséric seront heureux d'apprendre tous ces faits. J'espère que nos autres compagnons ont également réussi dans leurs missions ... avec un peu de chance, ils ont découvert où se terrent ces deux monstres ».

 

Rendez-vous à Hattousa

 

Bientôt le sentier sinueux qui les menait à travers le sous-bois fut jonché de cadavres. Quatre hommes restaient debout quand il sembla leur passer quelque chose dans la tête. Les membres de la secte de l'Indicible venaient d'être rattrapés par la folie sanguinaire de leur maître. Ils braquèrent leurs yeux injectés de sang sur Rahotep, Akurgal et Inyan. Les guerriers d'Odin préparèrent leurs glaives zébrés de traits glacés et d'éclairs menaçants. La colère enflait sous le crâne d'Inyan et lui secouait le corps tant elle était violente. C'était un soulagement de pouvoir laisser libre court à cette pulsion malsaine qu'il semblait apprécier pour la première fois. Poussant un hurlement à glacer le sang, il se jeta sur ces ennemis, sous le regard incrédule de ses compagnons qui lui emboîtèrent finalement le pas. Un des attaquants fut abattu au premier coup de pointe d'Inyan. Ces hommes avaient le visage maigre, les traits tirés par le mal qui les possédait. Normalement Akurgal aurait eu pitié d'eux, mais même lui ne pouvait à présent retenir la fureur qui l'entraînait à tuer pour survivre. Et ils furent bientôt tous morts. La terre en folie était couverte de sang et de débris humains qui n'exprimaient qu'avec trop de force la folie de ces temps obscurs.

Akurgal se dressa d'un bond, le visage en sueur. Encore un cauchemar, encore ce même cauchemar. Le voyage vers Hattousa avait été très difficile. A peine avaient-ils rejoint la Germanie par voie maritime que les ennuis avaient commencé. Le temps était exécrable, une pluie verglaçante rendait périlleuse la traversée du moindre chemin pierreux. Le pire restait cependant à venir : tous les villages traversés étaient au mieux désertés, le plus souvent réduits à l'état de cendres fumantes. Il n'était pas rare que des corps plus ou moins gelés par les éléments soient découverts, fichés sur des pieux acérés, démembrés et suspendus à des arbres devenus trophées mortuaires. Les trois hommes ne tardèrent pas à découvrir la source de ces malheurs : des hordes de guerriers germains, assoiffés de carnages, parcouraient tout ce pays en quête de nouveaux pillages. A quatre reprises, ils durent se battre contre une de ces colonnes de la mort ; combats acharnés, mais toujours victorieux grâce aux enseignements reçus en Asgard. Rahotep et Inyan surent aider Akurgal à mieux maîtriser les techniques de combat qu'ils avaient acquises lors de leurs formations, et le trio devenait à chaque rencontre plus puissant. Une seule fois, ils durent fuir le danger : par une nuit de pleine lune un monstre, mi-humain, mi-loup, s'attaqua à leur campement. Sa force colossale eut tôt fait de mettre en échec les assauts des guerriers d'Odin qui ne durent leur salut qu'à l'attaque surprise d'une araignée haute de près de deux mètres qui s'acharna contre le monstre humanoïde alors qu'il poursuivait les trois malheureux. En Dalmatie, ce fut la rencontre avec les membres de la secte du Soleil Noir qui devait tant marquer Akurgal.

- Encore un mauvais rêve ?
- Oui. Je repense toujours à ce combat, en Dalmatie. Cette violence, le visage d'Inyan, mon propre emportement, mon empressement à tuer ... je ne comprends pas ce qui m'arrive, ce qui nous arrive.
Rahotep tendit un verre d'eau à son compagnon et plissa son front, rendant son visage plus grave encore qu'il ne l'était avec son bandeau barrant son œil gauche.
- Nous n'avions pas le choix. Ces fous étaient possédés. Tu es un guerrier d'Odin, nous vivons des temps troubles, tu devras encore tuer, apprends à vivre avec.
- Tu as certainement raison.
Akurgal accorda à Rahotep un bref et triste sourire de gratitude. Il redressa les épaules, les dégageant de ses cheveux ébène soigneusement tressés.
- Tu es d'un grand réconfort, je suis heureux de t'avoir à mes cotés. Inyan est plus froid, il ne semble pas touché par cette violence, c'est peut être une force. Je n'étais pas préparé à tout ceci, mais qui aurait pu l'être. Ce qui s'est passé à Astragoth a déclenché un temps de malheur auquel nous devrons mettre un terme. J'apprendrais à vivre avec cette violence qui est en nous.

La porte de la chambre s'ouvrit dans un grand fracas. Inyan s'engouffra entre les lits, arborant un large sourire ; « Ils sont arrivés, ils nous attendent dans une petit salle que Youbdino (3) a aménagée à ma demande ». Sans attendre davantage, Rahotep et Akurgal suivirent leur compagnon dans une petite pièce circulaire. Une table ronde avait été dressée, copieusement garnie de pains, fruits, miel et lait de chèvre. Le Maître des hôtes était fidèle à sa réputation. Asturias était accompagné de Macubex et de Shiro, et tous trois se levèrent pour saluer leurs anciens compagnons d'arme. Inyan attendait son frère, mais comme l'avait indiqué Shiro, « Il a été retenu au Sanctuaire par une affaire très importante, il t'envoie ses salutations ». Les élus s'assirent, les regards se croisèrent. Asturias décida d'entrer tout de suite dans le vif du sujet.

- Nous sommes heureux de vous retrouver. Nous tenons ici notre engagement pris voilà 200 jours en Asgard. Nous avons parcouru des milliers de stades (4) pour honorer ce rendez-vous. Notre entraînement a décuplé nos capacités physiques et nous avons pu courir des jours entiers.
Shiro posa une petite sacoche sur la table et sortit un bout de parchemin qu’il fit passer entre les mains des guerriers d'Odin.
- Voici un message des autorités du Sanctuaire prouvant que nous parlons en leur nom. C'était une de vos demandes les plus vives.
- C'est très bien ainsi, répondit Rahotep en passant le parchemin à Inyan qui se contenta de le poser à côté de son verre rempli de lait de chèvre.
- Si nous sommes venus à vous c'est dans l'espoir de partager des informations, de nouer des liens nous permettant de faire face aux dangers qui nous menacent. Nos destins, j'en suis certain, sont liés depuis Astragoth, et bien avant depuis notre appel à rejoindre Hattousa.
- C'est aussi ce que je pense, Asturias. Je crois pouvoir parler au nom de Rahotep et d'Inyan.
Akurgal regarda tour à tour ses compagnons qui hochèrent de la tête. Il poursuivit en pesant chaque mot.
- Nous avons traversé des terres soumises à la folie de la mort. Notre propre terre, Asgard, est menacée par des dangers dépassant notre imagination la plus noire. Votre Sanctuaire est aussi en proie à de tels tourments. Notre offre est simple : nous vous aiderons à la hauteur de votre propre aide. Nous sommes près à échanger des informations, le cas échéant à nous battre à vos côtés contre des ennemis communs.
Inyan but son verre tranquillement comme Akurgal parlait. Il fixait Macubex qui n'avait pas parlé depuis leur rencontre. Il tentait de le jauger mais ses yeux noirs et son air sombre ne laissaient rien transparaître.
- Nous avons déjà identifié un ennemi commun, s'avança-t-il en coupant Akurgal. Soleil Noir, ou ce que tu appelles « l'Indicible » Asturias, nous avons rencontré des membres de sa secte en Dalmatie. Ces sauvages nous ont attaqués, je pense qu'ils en veulent à la Terre entière, voilà déjà un combat commun que nous pourrons mener.
- L'Indicible est une menace pour l'humanité toute entière, même pour les dieux. Nous nous battrons à vos côtés contre ce mal le moment venu, lorsque nous serons prêts. Ce mal absolu est bien trop puissant pour que nous nous y attaquions sans avoir préalablement bien préparé notre offensive.
- Certes, Asturias, certes. Mais vous pourrez compter sur nous. Alors, qu’avez-vous à nous offrir ?
Macubex croisa furtivement le regard de Shiro tandis qu'Asturias fouillait dans la sacoche à la recherche d'un second parchemin. L'Etranger prit la parole en fixant Inyan.
- Nous allons vous apprendre des choses très importantes, j'espère que vos renseignements seront à la hauteur, dit-il froidement.
- Voilà, tout est là, dit Asturias en tendant le parchemin à Akurgal qui s'empressa de le lire. Voici tout ce que nous savons sur Maiegeiam.
Le texte relatait tout ce que les serviteurs d'Athéna avaient pu apprendre à propos du Mage des mages. Rien n'avait été occulté. Akurgal blêmit en lisant les dernières phrases. Il passa le texte à Rahotep et Inyan. Tous lisaient le grec, Inyan avec plus de difficultés mais Rahotep lui soufflait les mots qu'il ne comprenait pas. Une fois fini les deux compagnons regardèrent Akurgal et prirent à leur tour un air consterné. Le Mésopotamien prit la parole.
- C'est grave, très grave. Comment ce mage peut espérer détruire les dieux ? Ce sacrilège le mènera vers sa perte, le monde ne peut exister sans les divinités !
- Il a l'air bien décidé à mener son projet à bien : qu'espère-t-il trouver en Niflheim, dans l’antre infernale de Hel ? s'inquiéta Rahotep. « Existerait-il un moyen d’y détruire les divinités ? » 
- Nous ne savons pas, répondit Shiro. « Mais cette menace est aussi importante pour le Sanctuaire que pour Asgard. Voici donc une première base d'entraide possible, nécessaire je dirais même. »
- C'est certain. Notre prêtresse vous sera reconnaissante, voici un danger que nous ne soupçonnions pas, un de plus, le plus grand à n'en pas douter, fit Inyan en se grattant le front, les yeux perdus dans ses pensées.
- Et vous, qu'avez-vous à nous apprendre ?
- Voici quatre textes : deux ont été traduits par Rahotep. Les deux autres ont été recopiés par mes soins, ils sont écrits en runes. Vous saurez les traduire, j'ai composé une aide explicative qui permettra à vos érudits d'appréhender cette langue sacrée d'Asgard. Tous ces textes proviennent de notre bibliothèque, immense lieu d'érudition.
Akurgal tendit aux Grecs cinq rouleaux de parchemin. Macubex prit le premier et le déroula. Il le lut d'une traite. Il était composé en grec, délicate attention de Rahotep appréciée à sa juste valeur.

 

« Yggdrasil, l'Arbre du Monde

A la base de l'Arbre du Monde Yggdrasil, se trouve Nidhogg, un énorme et très ancien dragon rouge entouré par d'innombrables rejetons. Nidhogg est occupé à ronger les racines de l'Arbre du Monde et éventuellement à couper le lien de Niflheim jusqu'en Asgard. Mais l'Arbre crée de nouvelles racines au fur et à mesure que Nidhogg les détruit. Le dragon Nidhogg peut être vaincu, mais en moins d'une année révolue, un de ses rejetons grossit en taille et en pouvoir et vient alors remplacer Nidhogg pour perpétuer sa tâche. »

 

« Je ne sais pas encore à quoi pourra nous servir ce texte mais merci, c'est un recueil de qualité », fit Macubex en enroulant le parchemin. Asturias s’empressa de ranger soigneusement ce dernier dans sa sacoche, tout annotant son carnet de nouvelles notes. A son tour, Shiro lut son parchemin. Lui aussi était en grec et semblait compléter le premier texte.

« L'Arbre du Malheur, Histoire et Grandeur du Royaume d'Asgard

L'Arbre du Malheur, peu nombreux sont ceux qui le connaissent. Peut-être quelques vénérables skalds pourraient encore en dire quelques mots si leurs mémoires ne leur font défaut. L'existence de cet Arbre remonte aux sources même de la création du monde. On dit que la déesse Hel le façonna de ses propres mains dans une glaise putride et nauséabonde, elle y enserra le Mal dans son état pur et le planta dans le royaume gris de Niflheim. On peut penser que cet arbre maudit a été créé pour offrir un reflet ignoble à l'Arbre du Monde, le frêne Yggdrasil. En effet, cette monstruosité se révèle en être sa caricature grotesque. On dit que la fille de Loki, alors ivre de colère et de haine, aurait créé l'arbre lorsqu'elle s'est aperçue que les racines du Frêne du Monde perçaient son royaume maudit. Sans doute espérait-elle que les branches immondes de son arbre pénétreraient les couches supérieures du Monde. Encore aujourd'hui, les racines putrides de cet arbre de malheur existeraient dans la forêt maudite des Elfes Noirs, dans une caverne maudite ... On dit même que quiconque suivrait ces racines dans les entrailles de la Terre trouverait le repère de la déesse au double visage ... »

 

- C'est un texte extraordinaire ! Je vois que vos informations sont de première qualité, vous êtes des hommes de parole.
- Tu en doutais Shiro ? répliqua Inyan l'air narquois.
- Non, bien entendu. Nous avons partagé assez de choses pour ne pas mettre en doute votre bonne volonté. En tout cas je renouvelle les remerciements de l'Etranger : ces informations nous seront précieuses, ne serait-ce que par l'évocation du Niflheim où Maiegeiam s'est rendu ...
- Et ce n'est pas tout. Les deux autres textes traitent d'Hel et du Niflheim. Vous en apprendrez beaucoup.
Asturias restait les yeux rivés sur son parchemin. Il avait rapidement ouvert les deux premiers qui, écrits en alphabet runique, demeuraient obscurs. Le troisième parchemin était une notice explicative permettant de déchiffrer ces deux textes. A côté de notes, un même texte était copié en trois langues : en écriture cunéiforme mésopotamienne, en runique et enfin en grec.
- C'est bien le texte que nous avons recopié de la statue en flamme en sortant des Enfers n'est-ce pas Akurgal ?
- C'est cela, cela provient du Koudourrou (5) . J'ai cru bon de vous aider à mieux comprendre l'écriture runique en traduisant ce texte dans les deux langues, grec et runique.
- C'est un cadeau extraordinaire Akurgal. Nous te sommes redevables de beaucoup. Je te jure de te rendre la pareille.
Le Dalmate leva les yeux et lut le texte à voix haute, lentement, posant chaque mot.

 

« Écoutez les paroles du Sombre Dieu,
Je suis l'ombre qui laisse place à la lumière du jour,
Je suis le messager de la Mort à l'apogée de la vie.
Je suis le voile sans fin de la Nuit avec lequel dansent les étoiles.
Je suis la Mort qui doit être admise afin que la Vie puisse continuer,
La Vie est cycle infini parce que tout ce qui a une âme doit mourir.
Je suis la force qui protège, qui pose les limites,
Je suis le pouvoir qui dit Non, Arrêtez, C'est Assez.
Je suis les mots qui ne peuvent être prononcés,
Je suis le Riche qui s'enrichit des âmes et des pleurs des humains,
Et je suis le rire sur les lèvres de la Mort.
 
Devenez mes serviteurs, rejoignez le Monde Souterrain,
Mais n'attendez aucune clémence des autres hommes en retour,
Car vous deviendrez mes Spectres, des êtres sans vie et si terrifiants ! »

 

Les élus poursuivirent leurs échanges pendant de longues heures. La confiance régnant, les éphèbes apprirent que Pallas et Seth étaient revenus d'un long entraînement avec le titre de Guerriers Sacrés de Bronze. Ils portaient respectivement les armures de la Croix du Sud et du Phénix, armures disposant de pouvoirs extraordinaires qu'ils n'avaient cependant pas encore pu voir. Ils ne dirent rien à propos du Souffle Divin, gardant pour eux la découverte de cette nouvelle force : les Asgardiens gardaient certainement des secrets pour eux même s'ils avaient précisé que leur royaume subissait les assauts des forces du Roi des Elfes Noirs. D'un commun accord, ils décidèrent de garder contact et de transmettre à leurs autorités respectives les bases de cette collaboration fructueuse. Les éphèbes quittèrent Hattousa dès le lendemain, Yolos leur ayant commandé de rentrer au plus vite : le temps de leur départ vers leurs quêtes respectives approchait. Bientôt eux aussi deviendraient des Guerriers Sacrés d’Argent !

***

La fumée se dissipa peu à peu derrière le rideau de lin. Les formes de Cybèle se dessinaient clairement maintenant ; elle se tenait debout, les bras levés vers le plafond du temple qui scintillait de mille feux. Il s'était empli d'étoiles après que la déesse eût prononcé des paroles inaudibles pour les serviteurs d'Odin. Ces derniers demeuraient agenouillés, les yeux rivés au sol comme la prêtresse le leur avait demandé avant de les laisser pénétrer dans le temple des oracles. Ils n'avaient pas eu besoin de poser la moindre question : Cybèle savait pourquoi ils venaient et, une nouvelle fois, allait les aider en prononçant son oracle.

« La déesse araignée attend dans son antre,
Le roi de Nibelung y forge son armée dans la terre sombre,
Dans cet antre Asgard sera voué aux tumultes des maux,
Lorsque le doigt croisera l'œil la colère vengeresse s'accomplira »

Trois jeunes prêtresses se rapprochèrent des guerriers et les relevèrent, faisant bien attention qu'aucun ne regarde la déesse. Elles les conduisirent au dehors où la grande prêtresse les attendait. Le ciel était chargé de lourds nuages, l'orage grondait déjà au loin dans les montagnes anatoliennes.
- Le temps est aussi inquiétant que cette prophétie, fit Inyan en voyant un éclair zébrer le ciel par-delà la porte du sanctuaire.
- Akurgal, tu as bien tout noté ?
- Oui, c'est fait Rahotep. Je dois dire que je suis autant inquiet que soulagé. Je m'attendais presque à pire.

Le Mésopotamien avait attendu ce voyage avec anxiété. Il se souvenait que Thenséric avait parlé d'Ereshkigal, la déesse infernale qui semblait veiller sur lui depuis le bref passage dans son domaine (6) . Bien qu'elle fût considérée comme une déesse infernale et donc redoutée, voire détestée par les hommes, elle s'était montrée étrangement bienveillante avec Akurgal. C'est elle qui, quelques mois auparavant, les avait guidé à travers Akurgal en-dehors des Enfers. Le scribe qui avait longuement étudié la geste des dieux à Uruk avait appris à la respecter et craignait à présent qu'elle ne fut mêlée aux troubles qui secouaient Asgard. Cybèle n'en avait soufflé mot, il devait donc s'agir d'une manipulation, d'une rumeur colportée par des forces voulant impliquer les divinités mésopotamiennes dans les affaires asgardiennes. Il faudrait certainement résoudre ce mystère un jour ou l'autre, mais pour l'heure Akurgal était soulagé.

- C’est réconfortant ! Je ne sais pas ce qu'il te faut mon vieux ! lâcha Inyan en s'énervant. « Nous avons la preuve absolue que le Roi des Elfes Noirs et la Déesse-Araignée se sont alliés pour nous détruire. Charmant ! Mais quel réconfort de le savoir, vraiment ! » conclut-il en levant les bras au ciel.
- Je voulais dire que nous n'apprenons pas grand chose de nouveau : Thenséric nous avait déjà parlé d'un possible lien entre la Déesse-Araignée et le Roi des Elfes Noirs. Thrall, Meijuk et Yshba sont partis en quête de cette antre avant notre départ, à l'heure qu'il est, ils doivent l'avoir découverte. Au moins, un nouvel adversaire ne semble pas se dresser devant nous.
- C'est une juste remarque, rétorqua Rahotep en essuyant une goutte qui venait de tomber sur son visage. Nous aurons obtenu ici cette confirmation et nous aurons appris auprès de nos amis grecs que Maiegeiam complote aussi contre nous, voulant la fin des dieux et donc d'Odin.
L'Egyptien prit un air plus sévère en répétant intérieurement la fin de phrase prononcée par Cybèle.
- Je m'inquiète cependant de comprendre ce que signifie cette histoire d'œil et de doigt. Je n'aime pas ça.
- Je vous rappelle, répliqua Inyan en resserrant autour de lui son manteau pour se protéger de l'averse orageuse naissante, que l'un des symboles de l'Indicible c'est le Soleil Noir, tel qu'Asturias nous l'a indiqué et comme le prouve les tatouages que portaient les fous que nous avons croisés en Dalmatie. Il y avait aussi sur ces derniers des doigts cachant le Soleil ... une simple coïncidence ? Et si l'œil était une image pour signifier le Soleil Noir ?
Akurgal fronça ses sourcils. Tout à sa joie de découvrir qu'Ereshkigal n'avait pas été citée par Cybèle, il n'avait pas repensé à cette dernière phrase. Inyan avait vu juste, tout concordait. «  Tu as raison Inyan, j'aurais dû être plus attentif. Nous aurons de sombres nouvelles à ramener aux nôtres ».

 

 

 

 

Les clés noires

 

De longues semaines s'écoulèrent avant que les guerriers d'Odin ne puissent enfin tous se retrouver à Troudheim. Ils y disposaient à présent d'une bâtisse à part entière dans laquelle chacun avait sa pièce. L'édifice de bois avait fière allure, le toit étant surmonté d'un majestueux dragon offert par des habitants de Troudheim trop heureux d'être sous la protection des guerriers d'élite d'Odin. Gunther avait été convié à la grande réunion organisée pour mettre à plat ce qui avait été découvert. Ce fut l'occasion pour lui de présenter Bjarnulf à ceux qui ne le connaissaient pas encore. Lueciek, bien que ramené à Troudheim, n'était pas là. Il se remettait doucement de ses épreuves dans la grande auberge de la grande cité du sud. Il lui faudrait du temps pour retrouver le goût de vivre, lui unique survivant de son village. Les choses étaient limpides : Maiegeiam représentait un danger très inquiétant et la Grande Prêtresse devrait prendre des mesures dans les semaines à venir pour monter une expédition à sa recherche. Il faudrait certainement l'appoint des forces du Sanctuaire et vivre avec cette menace jusqu'à l'élimination de ce problème. Gunther semblait moins inquiet que ses compagnons : il savait que Niflheim était un endroit terrifiant et pour y aller Maiegeiam devrait traverser les enfers. Tout magicien qu'il fut, il était peu probable qu'il réussisse. En outre sa gardienne, Hel, la déesse aux deux visages, ne laisserait personne fouler son domaine impunément, surtout pas un être venant détruire les dieux. Le plus pressant restait donc la menace que faisaient peser le Roi des Elfes Noirs, aussi connu sous le titre de Roi de Nibelung, Roi des Terres Sombres et la Déesse-Araignée, maîtresse des Odjurwigs. Ces deux êtres redoutables faisaient cohabiter deux races antagonistes, ce qui les rendaient encore plus dangereux : inutile d'espérer des dissensions dans le camp adverse. Ils se préparaient dans une crypte de la Forêt Ancestrale comme Meijuk, Yshba et Thrall l'avaient découvert. La prophétie de Cybèle indiquait que le temps pressait et qu'il faudrait agir avant que l'Indicible n'entre en contact avec eux, « c'est là la plus vraisemblable des explications à cette phrase », avait conclut Inyan dans une brillante démonstration qui avait emporté l'assentiment de tous.
« Voici mes ordres. En l'absence de Thenséric, c'est moi qui ai obtenu le commandement des opérations », dit Gunther en dévoilant sur la table une carte de la région.
Caressant sa barbe soigneusement entretenue, il poursuivit de sa voix grave. « Meijuk, Hanz, Memnoch, Inyan et Dimitre : vous allez rejoindre les Collines Grises à cinq jours de marche : vous y trouverez des grottes de Nains Fils de Fjalar. Ces derniers extraient du Mithrill dans ces sombres cavernes, et si nos informations sont exactes nous aurons besoin de ce métal pour forger les clés noires. Ces clés sont toutes identiques : une demi-lune de cette taille, dit-il en montrant un dessin assez ancien. La porte s'ouvre lorsque le Mithrill entre en contact avec l'emplacement de la clé taillé dans la porte de pierre : c'est une réaction magique que Thenséric a découverte voilà des années dans un vieux temple elfique abandonné dans l'ouest du pays. Les autres vous resterez ici avec moi : nous allons fortifier Troudheim : la muraille de bois doit être renforcée : elle sera remplacée par une muraille de pierre grise. Vous aiderez à son édification et à l'établissement d'un système défensif digne de ce nom : les attaques de l'armée de la Déesse-Araignée et du Roi de Nibelung ne doivent pas faire tomber Troudheim sinon nous perdrons notre seul port encore en activité. Asgard ne tiendrait alors plus longtemps sans l'apport de nourriture extérieure et de bière ! ».

Ceux qui restaient sur place n'étaient pas tous ravis de devoir simplement travailler au lieu de pouvoir se battre, mais personne n'objecta face au grand chef de guerre. Les cinq hommes désignés préparèrent leur paquetage et partirent le soir même.

***

Le froid était intense depuis leur départ. La neige s'était vite transformée en blizzard et les compagnons avançaient péniblement emmitouflés dans leurs manteaux. Les Collines Grises n'étaient qu'à cinq journées de marche en temps normal, il faudrait certainement plus de temps à travers cette tempête. Le quatrième jour fut marqué par un événement inquiétant ; alors qu'ils se reposaient au coin d'un feu en profitant d'une accalmie, trois boules de feu jaillirent de nulle part. La première fut déviée de justesse par Hanz du revers de son épée, les deux autres atteignirent de plein fouet le paquetage de la petite troupe. Ce dernier s'enflamma irrémédiablement, laissant les guerriers sans provisions pour les jours à venir.
- Mais qui a fait ça ? ALLEZ SORTEZ DE VOTRE TROU, VENEZ DONC VOUS BATTRE D'HOMME A HOMME ! hurla Dimitre dans une rage folle.
Memnoch et Inyan qui s'étaient jetés à terre se relevèrent. Le premier, tout en secouant la neige qui le recouvrait, se rapprocha d'Hanz.
- Tu nous as sauvé la mise.
- J'ai entendu un sifflement et j'ai fait ce que je pouvais, répondit humblement l'Asgardien de naissance. Mes sens sont de plus en plus affinés, je perçois de nouvelles choses. Mais j'ai en partie échoué, les deux autres projectiles ont atteint leur but. Il fronça ses gros sourcils et prit un air sévère. « Nous sommes découverts », souffla-t-il.
- Il faudra faire attention, rebondit Meijuk. « Gunther nous avait prévenu, les Fils de Fjalar ne sont pas de simples guerriers, ils ont des sorciers. La bonne nouvelle c'est que nous sommes sur la bonne voie. »
- Si, comme tu le penses, ce sont bien des Fils de Fjalar qui ont fait le coup, riposta Inyan en abordant la question sous un nouvel angle. « Pour ma part je n'ai pas vu nos agresseurs, nous ne pouvons être sûrs de rien. »
Les serviteurs d'Odin décidèrent de se remettre en route sans tarder, laissant pour un moment leurs interrogations derrière eux.

Deux jours passèrent. Affaiblis par leur périple et par le manque de nourriture et de boisson, les cinq compagnons étaient incapables de maintenir une course soutenue à travers le blizzard qui s'intensifiait davantage chaque heure. Le froid pénétrait partout, se faufilant à travers chaque espace disponible pour mordre la peau. Finalement ils arrivèrent un peu par hasard devant l'entrée d'une caverne. Il leur fallut avancer à quatre pattes pendant un certain temps dans un étroit boyau glissant. Cette caverne était occupée, des torches éclairaient à intervalle régulier le chemin, mais il n'y avait pas de gardes. Il faut dire que les Fils de Fjalar étaient connus pour leur sauvagerie au combat et que personne en Asgard n'osait plus s'aventurer dans les Collines Grises depuis des années. Le Mithrill était un métal très intéressant, à la fois résistant et léger, idéal pour les armes et les armures, mais les guerriers d'Asgard lui préféraient volontiers leur alliage de fer et d’Argent extraits des Montagnes Blanches pour les armes, le cuir renforcé pour les armures. Le métal noir était en effet très difficile à extraire et surtout très difficile à travailler : il fallait provoquer des chaleurs importantes et posséder de puissants fourneaux ; depuis le début des hostilités avec Loki et surtout les événements d'Astragoth le seul qui subsistait se trouvait dans la Forteresse, bien loin des réserves de Mithrill. Finalement Memnoch, qui ouvrait la marche, déboucha sur une grande salle. Comme ils le craignaient depuis quelques jours, les Fils de Fjalar étaient sur leurs gardes et avaient suivi la course des serviteurs d'Odin ; ils les avaient laissé pénétrer dans cette grotte pour mieux leur tendre une embuscade. Il était impossible de fuir et de toute façon il n'en était pas question : la pièce regorgeait de caisses du précieux métal. Lorsque Dimitre, qui fermait la marche, sortit à son tour du boyau un mécanisme se déclencha, fermant une lourde porte de pierre derrière eux. Six Fils de Fjalar en arme attendaient la confrontation, poussant des cris rauques, agitant leurs haches de guerre, tandis que quatre molosses portant des cuirasses à pics et un sanglier laineux bavaient d'impatience d'en découdre.
- Bon, au moins nous aurons de quoi manger après la bataille, moi j'ai faim depuis deux jours, lança Dimitre en sortant délicatement sa hache qui dégageait un froid intense, bien plus mordant que le blizzard extérieur.
- Avant de manger nous devrons nous occuper de ces gaillards, nota Hanz avec inquiétude. Ce ne sera pas chose aisée, ces Fils de Fjalar ont l'air solidement protégés dans leurs armures sombres. Et, fit-il en pointant son épée à deux mains qui résonnait comme si elle s'impatientait d'en découdre, ce sanglier et ces chiens enragés ne vont pas rendre la tâche plus facile.
- Je me charge des bêtes, occupez-vous des Nains. Je sais comment m'y prendre avec ces bestioles.
Meijuk ajusta sa rondache à proximité de son coude, laissant volontairement son poing gauche dégagé. Sa main droite serrait la garde de son glaive dont les étincelles électriques attiraient le regard carnassier des bêtes de combat.

Un premier Fils de Fjalar lâcha le sanglier sur Meijuk qui s'était avancé d'un pas. Avec une vitesse surprenante, ce dernier se jeta en avant, son poing dégagé venant s'enfoncer dans le groin de la créature et y restant englué. D'un geste plus rapide encore Meijuk décapita la bête sous les yeux inquiets des Nains. Ils ne s'attendaient pas à rencontrer si forte opposition : les guerriers d'Odin n'étaient plus de simples combattants. Ils se déplaçaient vite, bien plus vite que la normale, dégageaient une aura inquiétante qui ne cessait de grandir au fur et à mesure que le combat avançait. Pire, certains comme Memnoch et Inyan, parvenaient à dégager des charges d'énergie de leurs mains, décharges impossibles à éviter, irradiant de douleur leurs victimes. Il était trop tard pour reculer, les Fils de Fjalar devaient se battre de toutes leurs forces pour espérer en réchapper. L'un d'entre eux bondit sur Dimitre. Ses compagnons avaient tous un adversaire et s'en sortaient très bien. Inyan s'amusait avec ses ennemis, se contentant d'éviter les coups de hache, Meijuk embrochait le dernier molosse, tandis que sa main gauche tenait encore par sa gorge broyée le cadavre ridicule d'un congénère. Hanz et Memnoch n'étaient pas en reste, ils avaient été plus expéditifs, le premier se débarrassant tour à tour de deux adversaires, le second jouant avec le sien, lui découpant chaque main, avant de lui briser les genoux et finalement de lui planter son glaive à la base du cou. Dimitre attendit le dernier moment pour frapper. Il ferma les yeux tout au long de l'engagement, désirant sentir le moment opportun pour frapper. Sa hache s'abattit sur le crâne du Fils de Fjalar, le fendant en deux. Des traits de givre se mêlaient au sang qui dégoulinait du tranchant de sa hache. Lorsqu'il rouvrit les yeux, il put voir avec satisfaction que les combats étaient achevés. Les cris avaient cessé, certains râles de douleurs quittant les lieux dans un écho qui se propageait jusqu'aux tréfonds de la Terre.

- Une vraie boucherie. Ces Nains ne sont pas si terribles lorsqu'ils se battent au corps à corps.
- Tu sembles déçu, Dimitre. Pour ma part, je suis bien heureux que nous n'ayions pas croisé celui qui nous a envoyé ses boules de feu. Qui sait quel sort il aurait pu nous réserver.
- Hanz a raison, compléta Meijuk en essuyant sa lame. « Je suis certain que nous aurons fort à faire dans l'avenir. Je constate simplement que nos techniques de combat sont éprouvées. Memnoch, Inyan, il faudra réellement que vous nous expliquiez comment vous parvenez à déclencher ces vagues d'énergie », conclut-il en se retournant vers ses compagnons.
- Le talent, tout simplement le talent, rétorqua Inyan avec un sourire narquois.

Le groupe offrit un petit tombeau aux restes de leurs adversaires, signant leur crime en gravant un dragon d'Asgard sur une petite stèle de pierre. Le sanglier fut découpé, une partie fut conservée dans une sacoche Naine pour le retour, le reste fit un excellent repas qu'ils partagèrent au coin du feu. Après un moment de repos, les guerriers se mirent en route, rapportant à Troudheim trois caisses de métal noir.

 

 

(1) Epouse du dieu de la poésie Bragi, Idunn est la déesse nordique associée à la jeunesse éternelle des dieux d’Asgard.

(2) Identifié ici comme le Rhin.

(3) Voir le Prélude, premier livre de la série.

(4) Mesure grecque équivalent à 180 mètres.

(5) Stèle de pierre couverte de textes et de symboles associés aux divinités. Terme babylonien.

(6) Voir dans le Prélude, premier livre de la série, l'épisode en Mésopotamie.